Les clients d’une courtière immobilière réclament des dommages et intérêts après que leur rêve de posséder une résidence en République dominicaine soit tombé à l’eau.
Dans cette affaire, les demandeurs, qui ont investi dans la construction de condos en RD, perdent leurs investissements. En effet, le projet de condo ne voit pas le jour; une banque dominicaine possédant une hypothèque prioritaire (de 1er rang) sur le terrain où les condos sont bâtis exerce ses droits hypothécaires et en prend possession. Devant deux options hasardeuses leur permettant peut-être de récupérer une partie de leur investissement – soit de poursuivre localement le promoteur, soit d’opter pour la cession de leurs droits à des tiers dominicains – les demandeurs choisissent plutôt d’entreprendre des poursuites contre la courtière qui a fait la promotion du projet à Montréal et qui a négligé, selon eux, de vérifier si une hypothèque prioritaire affectait le terrain en RD et, par ricochet, le projet et leurs investissements. L’agence RE/MAX (« l’Agence ») se retrouve mêlée à cette affaire puisque la défenderesse Brun, qui travaille personnellement sur des projets à l’étranger, mais également pour l’agence en ce qui concerne des projets locaux, n’a pas établi de distinction claire entre ses projets personnels et ceux qui se retrouvent sous la bannière RE/MAX. Les demandeurs croyaient donc que le projet était chapeauté par l’Agence, et, ce faisant, la poursuive également.
La Cour supérieure précise que le devoir de vérification du courtier « lui impose de vérifier l’existence de limitation facilement vérifiable dans tout registre public », notamment une hypothèque immobilière. Sans alourdir l’obligation en exigeant du courtier qu’il effectue une recherche de titre en bonne et due forme, ce dernier se doit de vérifier si une hypothèque affecte un immeuble concerné et dans l’affirmative, doit en aviser son client afin que ce dernier consulte son avocat ou son notaire pour que lui soit expliqué les tenants et aboutissants de l’existence de cette limitation et de la décision juridique à prendre. En agissant ainsi, « le courtier se décharge de son obligation de vérification primaire » conformément à l’article 5 du Règlement.
Cette position, divergente à celle adoptée par la Cour du Québec et la Cour d’appel (voir les causes David A. Mellor Consultant inc. c Dahan, 2007 QCCQ 298 et le refus de la permission d’appeler de cette décision : AZ-50445155), est expliquée par la distinction que fait, à plus d’une reprise, le juge Blanchard. En réponse aux arguments retrouvés aux causes susmentionnées, il répète que le devoir de prendre connaissance de certaines informations contenues aux registres publics se distingue de « détermination de la réalité juridique » du client, ce qui relève d’un avocat ou d’un notaire.
Le juge Blanchard affirme que « ces obligations
La responsabilité de la courtière Brun est reconnue et elle est tenue de payer des dommages matériaux équivalant les sommes versées par les demandeurs, en plus de dommages moraux évalués selon le dommage démontré par chacun. Toutefois, la responsabilité de l’Agence et de son directeur ne sera pas engagée, faute de geste ou d’omission pouvant entraîner sa responsabilité.
Aspect intéressant de cette cause; la décision finale du Comité de discipline de l’Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ) est largement utilisée par la Cour pour établir la responsabilité de Mme Brun. Les déclarations sous serment faites dans le cadre de ses procédures, ainsi que le témoignage de Mme Brun, sont utilisés à plusieurs reprises. La Cour d’appel a confirmé en 2014 qu’une telle décision constitue « un fait juridique pertinent que nul ne peut ignorer, dont la pertinence va de soi et qui peut s’imposer quant à sa valeur probante ».
Vous pouvez consulter la décision complète en cliquant ici: Genesse c. Brun, 2017 QCCS 201